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Crédits : Vincent Gobert

Laure et Alexandre Prévault Osmani
L’amour du risque contrôlé
 

À la ville comme à la scène, ils sont deux trentenaires à la tête de Sabi Agri. Laure et Alexandre Prévault Osmani tiennent les commandes de la start-up clermontoise devenue en 7 ans une PME comptant 35 salariés. D’abord juriste, Laure est très tôt entrée dans la vie de Sabi Agri. Avant même que le premier tracteur Pom ne soit même vraiment mûr. En 2017, Alexandre, jeune exploitant agricole et ingénieur en mécatronique finalise la première version de ce porte-outil modulable électrique à arceau pour le maraichage. C’est le début de Sabi Agri.

En sept ans, les développements d’automoteurs se sont multipliés : Pom, Alpo, Zilus. La promesse de tracteurs légers devant s’inscrire dans une production agroécologique et bas carbone séduit. Laure et Alexandre obtiennent des labels et gagnent plusieurs concours. Deux levées de fonds se succèdent. D’abord 1,8 million d’euros en 2018, puis 8 M € en 2022. Les locaux s’agrandissent. Sabi-Agri s’installe à Saint-Beauzire, dans le Puy-de-Dôme, en 2019, puis pousse les murs en 2021.

Laure et Alexandre tiennent toujours les rennes et l’entreprise reste familiale. Car le couple s’inscrit dans un contrôle strict de leur aventure entrepreneuriale. D’une part, ils tiennent à ce que leur modèle économique perdure, en répondant à un besoin. Voire – à l’instar des groupes les plus imposants de la tech – ils créent le besoin : un tracteur électrique, léger, produit en local, évolutif, et pour le robot Zilus qui sait travailler en binôme avec un autre tracteur. « Notre positionnement se veut singulier. L’offre en tracteurs électriques grossit. Mais nous nous démarquons toujours, sans concurrence frontale ».

L’autre aspect du contrôle est celui – autrement plus stratégique - du financement et de l’investissement dans Sabi-Agri. Rien ne fuite sur leur chiffre d’affaires. Le seul indicateur partagé, non des moindres, est celui de leur croissance. « En 2022 nous avons doublé notre croissance, se félicitent-ils. C’est confortant, c’est excitant, c’est l’aventure qu’on écrit. C’est assez vertigineux, mais ça ne nous fait pas peur. Car on l’avait prévu, dès le début ». Pour ce qui est de la gouvernance, « nous nous entourons au Conseil d’Administration d’investisseurs qui partagent notre vision et nos objectifs de croissance, en restant maîtres de nos décisions ».

Cette saison 2023-2024 est un virage pour Sabi-Agri. A l’image de ce qui s’est passé pour la marque lors de ce Sitevi. « Nous avons stabilisé notre réseau de distribution avec 8 structures pour couvrir tous les bassins de production viticoles français. Reste le Languedoc, en cours de finalisation. Nous avons donc pu réaliser un maximum de présentations des matériels aux clients. Les Sitevi Innovation Awards ont consacré notre solution de Flotte robotique collaborative entre l’Alpo et Zilus. Le passage du ministre de l’Agriculture sur notre stand était aussi un moment fort ». Côté matériels, Laure retient « une bonne réceptivité des viticulteurs passés sur le stand. Ils sont vraiment en quête de solutions et d’achat sur les technologies pour lesquelles nous avons une offre. Ils veulent des démonstrations chez eux après avoir vu les autres machines. C’est très positif ».

Et l’aventure est parsemée d’autres engagements. Plus professionnelle que jamais, Laure s’investit beaucoup dans l’entreprenariat, au féminin. « Je suis impliquée dans la création de l’European Female Founder, une structure lancée sous l’impulsion de la Commission Européenne, qui aura pour objet de faciliter l’accès à l’entreprenariat pour les femmes, d'inspirer, d'encourager et de construire une nouvelle voie pour elles ». Et ce n’est pas tout, Laure s’investit aussi dans le pendant français de cette mission, avec le collectif « SISTA EntrepreneurEs », qui promeut plus de diversité dans l'économie numérique en encourageant notamment plus d’investissements dans les entreprises dirigées par les femmes. « Quand on est une femme arrivée dirigeante dans un milieu masculin, on doit beaucoup à celles qui sont passées avant. Je m’engage par essence ».

Loin de s’endormir sur leurs lauriers, Laure et Alexandre visent désormais un changement d’échelle pour Sabi-Agri. « Côté produit, le marché viticole est devenu très important pour nous. La demande est forte. Mais on a toujours la volonté de proposer des tracteurs polyvalents pour d’autres filières. En ce sens, dans quelques semaines, nous allons présenter un nouveau modèle adapté aux paysagistes, aux productions à fortes valeur ajoutée comme les PAM, à certains élevages, etc. ». Côté ventes, les clermontois visent désormais l’Europe. « On ouvre de nouveaux marchés, confie Laure. Nous sommes notamment en discussion avec des acteurs suisses et italiens. Et j’espère très bientôt en Espagne, en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas ». Vers l’infini et au-delà.

 


Vincent Gobert